Interview avec Xavier, le chanteur de MALEMORT
MALEMORT est un groupe à part car il n’a choisi aucun style. Bien au contraire, en mélangeant les influences, il obtient une identité propre soutenue par un chant en français. Le groupe qui avait sorti un premier album en 2013, intitulé « French Romances » revient cette année avec un nouvel opus intitulé « Ball Trap ». Il paraissait important d’en savoir un peu plus sur ce qui passionne le groupe et c’est Xavier, le frontman de MALEMORT, qui a bien voulu répondre à nos questions.
Avec « French Romances » et son large mélange de styles ainsi que le chant en français, ce n’était pas forcément gagné d’avance… et pourtant « Album du Mois » chez Rock Hard et même une publication dans Metal Hammer en Allemagne ! Qu’est-ce qui a, selon toi, su les convaincre ?
Je pense que la prise de risque est presque un devoir pour des musiciens qui débarquent 40 ans après la création de la musique du diable ! Il faut éviter de ronronner, de perpétuer… Le metal est friand de traditions, cela fait une partie de son charme (j’y succombe moi-même bien volontiers), mais ne le transformons pas en musée.
Le premier album apportait de la fraîcheur et des chansons qui se foutent de savoir si elles sont heavy, thrash ou guinguette ! Il a été ressenti comme ça par la critique … restait à convaincre le public. L’avantage de cet album, c’est qu’il affichait déjà la liberté musicale comme une des composantes de l’entité Malemort. Nous avions donc les coudées franches pour la suite.
Vous avez déjà eu l’occasion de croiser pas mal de groupes et certains, plus connus que d’autres, comme DEATH ANGEL, NO ONE IS INNONCENT, PRO-PAIN… qu’en retiens tu ?
Quasi systématiquement, nous jouons avec des groupes qui appartiennent à des scènes définies, ce qui exige pour nous de « sortir la paire » afin de faire accepter notre différence. Notre énergie live très punk nous aide, de même que le plaisir que nous avons à communiquer avec le public. Et ça se passe toujours bien, à vrai dire, notamment avec les groupes plus brutaux. Quant aux grands groupes dont tu parlais, outre le fait que c’est une immense fierté de les approcher, il y a des choses qu’un groupe ne peut apprendre qu’au contact de pareilles machines de guerres, qui sont détentrices d’une expérience énorme.
« Ball Trap » est, je cite, « le parcours initiatique d’un jeune homme dans le chaos artistique avant-gardiste des années 20 », comment est venue l’envie d’écrire cette histoire ?
Une sorte d’obsession venue de je ne sais où, bien que je sois fasciné de longue date par cette période. Je tannais mes proches avec cette idée, tout en me refusant à accepter la piste du concept album, parce que j’ai souvent trouvé que les concepts, dans le metal, ont un côté prétentieux ou fumeux. Mais il a fallu se rendre à l’évidence, mon esprit ne me laissait pas le choix !
Et pourquoi avoir choisi le thème des années 20 ?
Elles sont un étrange havre de fantaisie débridée et de créativité sans limite, coincé entre la boue de 14-18 et les remugles des totalitarismes années 30. Et puis elles ont pris une belle patine. J’aime les filtres qui embellissent l’image brute de notre monde.
Vous avez enregistré au Conkrete Studio avec Mobo qui est plutôt connu pour avoir travaillé avec des groupes beaucoup plus Metal comme LOUDBLAST, GOROD ou MERCYLESS, pourquoi ce choix ?
J’écoute aussi beaucoup de metal sombre. Et puis étant donné la prééminence et la qualité du metal brutal en France, il est normal que les meilleurs studios spécialisés dans ce genre affichent de telles références. Mais Mobo a plus d’une corde à son arc. C’est aussi un pionnier dans les musiques de jeux vidéo ainsi qu’un excellent bassiste plus « hard-rock », qui a accompagné Bumblefoot dans le passé. Il est donc large d’esprit.
Comment est venue la collaboration avec Nicolas Dubuisson qui a dessiné votre pochette ?
Nous connaissions ses qualités techniques et artistiques, mais il officie dans un registre plus …sanglant que ce qui convient à Malemort. Notre premier entretien m’a immédiatement permis de comprendre que j’avais à faire à un artiste prêt à tous les défis, extrêmement curieux. Peut-être que troquer provisoirement les zombies pour des femmes dénudées ne le dérangeait pas tant que ça !
Vous avez reçu à nouveau de belles louanges depuis la sortie, et notamment de Rock Hard, est-ce que ça ne peut pas vite monter à la tête ?
Oh que non, et pour deux raisons : tout d’abord, la reconnaissance par les pros de la qualité de ton travail ne te permet plus, de nos jours, en France du moins, de changer réellement de statut matériellement : nous restons un petit groupe qui se gère tout seul, on travaille comme des dingues.
D’autre part, ce genre de louanges rend les gens bien plus exigeants vis-à-vis de nous. Lorsque tu te retrouves dans un top 10 de l’année au milieu de références internationales, tu es sensé l’assumer … avec tes petites mains! Et je ne te parlerai pas de certaines jalousies… Autant te dire que nos melons ne sont pas prêts de mûrir !
Vous êtes encore indépendant, avez-vous l’intention de changer de statut prochainement ?
Nous sommes maintenant distribués pas Season Of Mist, édités par les Editions Hurlantes et depuis peu secondés très efficacement pour la promo par un gars formidable qui est fan de Malemort. Ne nous manque plus qu’un tourneur. Le label n’est pas une nécessité dans l’immédiat.
Et justement est-ce que selon toi, il est encore possible de rester complétement indépendant ?
De nos jours, tu n’as à vrai dire pas le choix. Et cela vaut bien mieux qu’un mauvais deal, nous avons pu le constater dans notre entourage. Les labels ne font souvent plus de développement, faute de moyens. Alors, c’est nous qui développons, à la force des bras ! Mais nous allons avoir besoin de relai si nous voulons tenir au niveau auquel on nous attend. Visiblement, ça commence à venir. Je dois pouvoir me consacrer à nouveau à la musique, et pas uniquement à la tâche écrasante promo/programmation…
Comment vois-tu les prochaines années de MALEMORT ?
Je crois que Malemort a encore des choses à dire, je perçois un album audacieux… à condition que je ne tombe pas de fatigue entretemps.
Le mot de la fin ?
Merci à TRexSound et à ses lecteurs! Vous aurez la possibilité de voir Malemort en concert à partir de septembre…
Pour en savoir plus: https://www.facebook.com/malemortband/